Méthode

Les mesures présentées ici sont le résultat d'un processus en plusieurs étapes. Au début du projet (septembre 2019), nous avons contacté une quarantaine d'associations impliquées dans la défense des animaux. Nous avons répertorié presque 200 mesures en faveur du bien-être animal, soit à partir des retours directs des associations, soit, quand en l'absence de réponse, à partir des mesures mises en avant sur leur site internet.

Nous avons ensuite réduit cette liste en ne retenant que les mesures les plus fiables en termes de chiffrage, le consensus potentiel, et l'impact potentiel. Les mesures dont le coût était trop difficile à chiffrer ont ainsi été écartées. De nombreuses mesures nous sont également apparues comme trop difficiles voire impossibles à mettre en place à court-terme. Ainsi, les mesures ne relevant pas uniquement de la représentation nationale, comme les questions de régulation de pêche, ont été écartées. Les mesures manifestement trop abolitionnistes, comme l'interdiction de la consommation de viande, ont également été écartées. Cette approche ne préjuge en rien de la qualité éthique, économique, sanitaire ou environnementale de ces mesures, mais l'objectif a été de proposer des mesures pouvant être rapidement mises en place et jouissant d'un fort consensus.

Les mesures retenues pour le chiffrage ont été assignées à des commissions thématiques spécialisées. Ces commissions ont veillé à éviter les doublons et ont permis de chiffrer les différentes mesures. Une fois le chiffrage établi, nous avons sélectionné deux mesures par commission pour l'enquête représentative. Cette dernière sélection s'est effectuée au niveau de chaque commission : les membres des commissions ont décidé en concertation des mesures les plus impactantes et les plus fiables à mettre en avant. Au total, ce sont 20 mesures qui sont présentées sur le site et pour lesquelles l'échantillon représentatif de Français a été interrogé.

Nous avons essayé de contacter les plus grandes associations de défense des animaux qu'elles soient spécialisées ou généralistes, welfaristes ou abolitionnistes, qu'elles promeuvent ou non le végétarisme ou le véganisme, qu'elles aient un objet social très concret (assistance aux animaux) ou plus général. Pour ce faire, notre équipe a mobilisé plusieurs canaux de communication : mail, réseaux sociaux (Facebook, Twitter), ou bien formulaires de contact en ligne. La période de prise de contact s'est déroulée de mi-septembre à mi-octobre 2019. Les associations n'ayant pas répondu ont été relancées début octobre.

Liste des associations contactées par ordre alphabétique : 269 Life, Acta, AFAAD, Alarm, Anonymous for the Voiceless (INT), Antidote, ASPAS, Association Stéphane Lamart, Association végétarienne de France, Boucherie Abolition, C'est Assez !, CIWF France, Cj-Vegan, CNSPA, Code animal, Droit des Animaux, DxE France, Earth Resistance, Fondation 30 millions d'amis, Fondation Assistance aux Animaux, Fondation Brigitte Bardot, Humanimo, IFAW, L214, LFDA, LPO, OABA, One Voice, Paris Animaux Zoopolis, PETA, Pro Anima, Sea Shepherd France, SNDA, Société anti-fourrure, Someone Not something, The save movement, Vasara, Vegan Impact, Welfarm, SPA, Greenpeace France.

La procédure de chiffrage est spécifique à chaque domaine car les mesures proposées sont très hétérogènes. Cependant, nous avons veillé à respecter plusieurs principes lors du chiffrage. De manière générale, nos calculs se sont attachés à estimer le coût pour les pouvoirs publics de mettre en place les mesures proposées. Notre objectif a en effet été d'appréhender combien l'État devrait payer pour mettre en place les mesures retenues et combien les citoyens consentiraient à payer par l'impôt pour cette mise en œuvre. De manière générale, nous n'avons pas intégré les coûts de long-terme associés aux changements de législation, car ils apparaissent trop incertains. Par exemple, l'interdiction des fermes-usines pourrait conduire à diminuer l'emploi dans ces exploitations, mais pourrait également stimuler l'emploi dans des fermes de plus petite taille.

Il est important de noter que nos coûts ne prennent pas en compte les possibles pertes de profits privés associées au changement de législation. Par exemple, interdire les fermes à fourrure pourrait induire une perte de profits pour les exploitants de ces fermes mais nous avons considéré que l'État n'a pas à compenser ces pertes de revenus car il ne le fait pas dans d'autres domaines. Ainsi, quand l'État propose une taxe sur le sucre dans les boissons sucrées, il n'indemnise pas les entreprises du secteur pour leurs pertes de profit. Cependant, quand certaines transitions peuvent s'avérer délicates, comme dans le cas de l'interdiction de la production de fourrure ou la fin des spectacles de cirque avec animaux, nous avons considéré des aides publiques à la transition qui entrent donc dans le calcul des pouvoirs publics. Quand un contrôle du respect de la législation nous a paru important, comme pour l'interdiction de certaines pratiques de chasse ou le contrôle de l'étiquetage des ovoproduits, nous avons inclus des dépenses supplémentaires de personnel pour mener à bien cette surcharge de travail. En outre, pour la majorité des mesures, nous avons calculé le coût de mise en place de la mesure en "une fois". Cependant, dans certaines situations, les mesures peuvent s'étaler sur plusieurs années, comme les campagnes d'identification ou de stérilisation, et les coûts de mise en œuvre ont été ainsi répartis sur plusieurs années.

Enfin, pour toutes les mesures présentées, le coût final a été calculé par Français et par an pour une période de cinq ans. Cette présentation permet de faciliter la comparaison avec les volontés à payer qui ont été estimées par an par répondant pour une période de cinq ans. Nous avons fait le choix de diviser le coût total par le nombre de Français (67 millions) car ces mesures bénéficieront à tous les Français et certaines contributions publiques peuvent s'appliquer à tous les Français (par exemple : la TVA). Une autre possibilité serait de calculer le coût par adulte. Pour retrouver les coûts par adulte plutôt que par Français, il convient de multiplier les coûts par Français par 1,27 (données démographiques 2019).

Dans notre étude, nous présentons la volonté à payer des Français pour chacune des mesures que nous avons analysées. La volonté à payer pour ces mesures a été estimée à l'aide des méthodes d'évaluation contingente. Ces méthodes visent à mesurer le prix que serait prête à payer une population pour des biens non-marchands (comme la protection de la nature).

Pour ce faire, nous avons construit un questionnaire qui comprend l'ensemble des mesures proposées avec un descriptif succinct du contexte. Les questions posées lors de l'enquête sont présentées dans les pages associées à chacune des mesures. Ces questions ont été posées à un échantillon représentatif de la population française au travers d'une enquête opérée par OpinionWay (enquête en ligne, 1500 participants, mars 2020).

Chaque participant était invité à indiquer le montant qu'il serait prêt à payer pour la mise en place de la mesure. Il était précisé que ce montant était un montant annuel qui devrait être payé tous les ans pendant cinq ans et qui serait financé par une hausse d'impôts. Il était demandé aux participants de répondre de la manière la plus sincère possible, comme s’il s’agissait d’une situation réelle et de bien considérer l’impact sur leur budget.

Les participants à l’enquête étaient invités à indiquer le montant qu’ils étaient ainsi prêts à payer par an pour chacune des mesures. La moitié de l’échantillon pouvait répondre librement (méthode dite open-ended), tandis que l’autre moitié de l’échantillon devait indiquer un intervalle (0€, entre 0,01€ et 0,99€, entre 1€ et 1,99€, ..., entre 9€ et 9,99€, ou 10€ ou plus) (méthode dite payment card). Ces deux méthodes présentent chacune des avantages et inconvénients, c’est pourquoi il a été décidé de randomiser les participants dans chacune des deux conditions. La méthode open-ended n’offre pas de point de référence au citoyen ce qui évite des biais de présentation (framing effects) mais peut également perturber le répondant. Au contraire, la méthode des cartes de paiement permet de mieux orienter les participants mais introduit des biais de framing à cause du choix des catégories retenues par l'enquêteur.

Les montants finaux présentés ici ont été obtenus de la manière suivante. Premièrement, nous avons recodé les réponses par intervalle comme étant égales aux points médians de l'intervalle pour les données obtenues par la méthodes des cartes de paiement (exemple : entre 1€ et 1,99€ devient 1,5€). Deuxièmement, nous avons recodé les réponses obtenues dans les réponses ouvertes pour limiter à 10€ le montant proposé. En effet, certains répondants ont déclaré des montants trop élevés pour qu'ils soient soutenables (plusieurs milliers d'euros au total). Ceci nous conduit à sous-estimer la propension réelle à payer. Troisièmement, nous avons fait la moyenne des deux méthodes de paiement combinées (la méthode ouverte induisant des réponses plus élevées que la méthode par carte de paiement). Cette moyenne a été pondérée par le poids de chaque individu dans la population française.

Les résultats présentés sont une première approximation de l'utilité qu'auraient les individus à mettre en place ces politiques. Le biais hypothétique (i.e., le fait qu'on ne paie pas vraiment) peut nous conduire à surestimer la volonté à payer réelle, tandis que la troncature des réponses à 10€ peut nous conduire à la sous-estimer. En revanche, plusieurs facteurs suggèrent que nous pourrions sous-estimer l'utilité qu'aurait la société à mettre en place ces mesures. Ceci fera l'objet d'une publication scientifique ultérieure.

Vous pouvez nous écrire à : vingtmesures@avca.fr